Le corps en écriture : de la parole aux actes

« S’approprier l’espace public » – entend-on souvent. Est-ce que l’espace public est vécu de la même manière par les genres différents ? A qui appartient cet espace ? Vous sentez-vous en sécurité quand vous sortez ? Pensez-vous aux vêtements que vous mettez en fonction de l’heure à laquelle vous sortez, en fonction de l’endroit où vous allez ?

« Je m’identifie en tant que femme et je suis assez féminine de l’extérieur. J’aime porter des jupes, des talons, me maquiller. Mais je ne le fais pas tous les jours, je mesure ma féminité en fonction des endroits où je vais. Je n’enfilerais pas une jupe avec des talons si je sais que je dois rentrer tard dans la soirée. Ou sinon il faut que je prenne un taxi, et non pas Uber de préférence (on ne sait jamais…) »

« Quand je rentre le soir je reste au téléphone tout le temps pour que l’on ne m’embête pas. Un jour j’ai dit à mon père que j’ai été embêtée dans la rue, il m’a répondu : Mais ce n’est pas étonnant si tu portais cette jupe-là. Du coup, je n’en parle plus à personne. Mais cela m’arrive tous les soirs »

« J’étais serveuse. Un mec m’a parlé pendant mon service et après il m’a suivi dans la rue jusqu’à chez moi »

« J’étais dans le RER, je rentrais d’une boîte. Il m’a suivi, en me parlant, je parlais avec lui pour ne pas paraître impolie. Il a failli rentrer avec moi dans l’immeuble. J’ai eu très peur… »

Depuis à peu près un an, nous collectons, en France et en Russie, des témoignages des personnes sur leur identification de genre, leur sexualité, leur rapport aux masculinités et aux féminités. Le rapport à l’espace public est quelque chose de récurrent dans ces témoignages. Pour donner suite à cela, l’équipe de la compagnie FluO a décidé de mener un projet de médiation dans le quartier de Bacalan en partenariat avec le Cerisier dans le cadre de la Quinzaine de l’égalité, de la diversité et de la citoyenneté organisée par la Ville de Bordeaux.

Notre volonté est de faire en sorte que des participants aux ateliers et des spectateurs des impromptus (performances improvisées faites à l’improviste dans l’espace public), interrogent la relation aux mouvements de leur propre corps dans l’espace public de leur quartier et la ville en général.

S’approprier l’espace public, inscrire sa présence et les flux de son corps dans les flux d’une ville, raconter son expérience de l’espace public, en tant que « femme », en tant qu’ « homme », en tant que corps vivant… Vivre et transformer cet espace par sa présence…

La ville se construit et évolue comme un corps humain. Les différents espaces qui la constituent, dialoguent entre eux, s’interpénètrent, frictionnent et se relient par des flux permanents. Les corps sont façonnés par l’espace autant que l’espace l’est par les corps.

En faisant se mouvoir les corps par la danse et en extériorisant l’intime qu’ils contiennent par l’improvisation, la parole devient spontanée et se libère, permettant de transformer son rapport au corps, à l’espace et au temps.

Par des collectes de témoignages, des ateliers d’improvisation et des impromptus chorégraphiques apparaissant dans le quartier, nous proposons aux habitants du quartier Bacalan d’interroger leur relation à leur quartier, à la ville, à l’espace public, aux normes sociales, de vivre leurs corps, les sentir bouger dans l’espace, pour sentir un lien avec les autres, avec son quartier, avec la ville.

Nadia Larina, Compagnie FluO

Every drop of my blood, création 2022 (c) Quentin Geyre

+ d’infos sur le spectacle Every Drop Of My Blood

Calendrier :

Projet de médiation en lien avec le spectacle Every drop of my blood :

Le corps en écriture : de la parole aux actes, ateliers collectes de témoignages et improvisation chorégraphique

  • Du 1er au 12 novembre 2021 au Cerisier, lieu de pratiques intermédiaires et quartier Bacalan à Bordeaux (33)
    Dans le cadre de dans le cadre de la Quinzaine de l’égalité, de la diversité et de la citoyenneté de la ville de Bordeaux.
  • Vendredi 12 novembre à 19h : soirée de clôture
    Performance chorégraphique et musicale suivie d’une discussion sur la thématique « Le corps dans l’espace public »